Tous les regards se tournent actuellement vers les cours pétroliers, qui franchissent des seuils de prix les uns après les autres, au point de susciter des inquiétudes sur la dynamique de l'inflation et sur la capacité des banques centrale à la juguler sans nouveaux tours de vis monétaires. Le baril de Brent s'est temporairement négocié à 95 USD, soit une augmentation de 25% en seulement quatre mois. C'est dans ce contexte que fleurissent des articles et  autres analyses prophétisant un baril à 100 USD dans un avenir proche. Qu'en est-il vraiment ?

Commençons par le début. Ce rallye des prix résulte en grande partie de l'action coordonnée de l'Arabie Saoudite et de la Russie, qui imposent leur étreinte sur l'offre mondiale à travers des coupes de production volontaires. Ensemble, c'est près de 1,3 million de barils par jour qui sont enlevés de la production mondiale, et ce, au moins jusqu'à la fin de l'année. Ces réductions interviennent alors que le marché pétrolier est déjà en train de se resserrer depuis quelques mois. Un resserrement qui résulte justement du contrôle de la production par l'OPEP alors que la demande de pétrole reste résiliente.

A cet égard, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) alerte une nouvelle fois sur les risques d'un resserrement significatif du marché à l'heure où les stocks mondiaux sont faibles. L'AIE s'attend à un déficit "important" de l'offre tout au long du quatrième trimestre. Même son de cloche du côté de l'OPEP, qui prévoit un déficit de l'ordre de 3,3 mbj entre la production et la consommation mondiale. Cette combinaison (stocks faibles et marché sous-approvisionné) constitue bel et bien un alignement des planètes en faveur d'un baril à 100 USD.

Dans ce contexte, un déclin des prix ne peut survenir qu'à plusieurs conditions plus ou moins probables. J'écarte tout de suite la menace américaine envers l'Arabie Saoudite et la Russie, puisque cette option n'a pas fonctionné par le passé. Vient alors d'autres options, comme l'apparition d'une nouvelle offre générée par des nouveaux gisements rentables avec un prix du baril à 85-90 USD. Ce processus est déjà en cours aux Etats-Unis, dont la production nationale augmente à un rythme plus soutenu depuis le début de l'été. Il y a aussi le cas de l'Iran et du Venezuela, deux pays sous sanctions américaines, qui pourraient revenir sur le devant de la scène grâce à un apaisement des relations avec les Etats-Unis. Enfin, il y a l'option la plus douloureuse, celle d'une destruction de la demande causée par des prix trop élevés. Cette deuxième éventualité repose majoritairement sur la Chine, qui représente 75% de la croissance de la demande mondiale à elle-seule.